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[2.2.3] Vocalisme

Dans le tableau suivant, nous comparons les traits vocaliques que nous avons recueillis à Senneville à ceux d'Yport et à ceux des villes et villages où nous avons fait des enquêtes.

Français commun, terme dialectal

Senneville

Yport

Localités de l'annexe 1

Prononciation de la finale /é/ écrite -é, -er, -ai, etc.

clé
côté
électricité
(à) moitié
pavé (carrelage)
perrey
quai
rocher
regretté
tombé
couché

clè
côtè
électricitè
(à) moitiè
pavè
perrey
roquer
regrettè

timbè
couchè

cleu
côteu
électriciteu
(à) motieu
paveu
perreu
queu
roqueu
regretteu
timbeu
coucheu

cli, StV
côti, StV


pavi, StV
perra, StV
qui et qua, StV
roqua, StV
regretti, StV
timbi, StV
couchi, StV

Prononciation de la finale écrite -ée

* La terminaison -ée correspond à -eille ou /è/ long local

jetée (n. f.)
rosée
brûlée

jteille, jtèe
roseille, rosèe
bruleille, brûlèe


rouseille
inusité

jtie, StV
rosie, StV
brulie, StV

*La terminaison -ée correspond à -aille local

bourrée (ajoncs)
cavée
homme-année (employé à la journée)

bourraille
cavaille
omonaille

inusité
caveille
inusité



oman'né, GD

*La terminaison -ée correspond à /-i/ local

brassée
poignée

dragée

brachie
poignie (et pognée)


pougnie

dragie

brassie, StV
poignie, pognie, G pougnie, C

/a/ vs / â/

patron
dommage

pâtron
dômmâge


dammâge

 

/o/ (hotte) vs /ô/ (haute)

bosse, n. f., mar.
folle, adj. f.
folle, n. f., mar.
pilote
voler

inusité
fôle

inusité
vôler

bôsse
fôle

pilôte

 

/ou/ vs /ô/

boue, fou, mou

bôe, fô, mô

 
 

/ou/ vs /o/ (port)

coursive
coutume
journée


coteume
jorneille

corsive
couteume
jôrneille


couteume, GD
journeille, GD
jornie, StV

/i/ vs /è/

cuisine
terrine
farine

cuisène
terrène
farène

 
 

/u/ vs /eu/

fumaient
lune
une
plumaient

feumaient
leune
eune
pleumaient

 
 
/ar/ vs /er/

argent
marche, n. f.
marquer
sarcler

ergent (30)


sercler

ergeunt

merquer
sacler


merche, C

/a/ vs /o/

manant
(malheureux)

monant

manunt

 

/eu/ vs /u/ parler local

bleu
malheur

blû
malû

 
 

Amuïssement de voyelles dans la syllabe initiale

commander
commencer
commun
descendre
ramender

cmmander
cmmencher
cmmun
dchendre
rmender

cmmonder
cmmacher


rmader





ramander, StV

/oi/ vs /è/ et /é/

avoine
fois
moi, toi

boisson
poire
poisson
soir

avène

mè, tè

besson
pée
pesson
soué



meu, teu et ma, ta




mé, té, ET
ma, ta, StV

pé, père et pouère, V

/oir/ vs /é/

avoir
boire
savoir

avé

savé

 
 

/oif/ vs /è/

soif

seu

sè, C, StV
sé, G

/oir/ vs /eux/

mouchoir
tiroir

moucheux
ti(r)eux

 
 

/oi/ vs /è/ et /eille/

croit
doit
voit

crait
dait
veille

cret
det

 

/in/ vs /in (31) /

lapin
riboudin (troglodyte)
matin
maquereau
dépiauté
parti-pris

lapiin
riboudiin
matiin




équ(h)iin
ohiin

lapin, GD
riboudin, GD
matin, GD
béquet, StV

/i/ vs /in/

chemise
ficelle
pris, appris

cminse
fincelle
prins, apprins


fichelle


fichelle-lieuse, GD

/on/ vs /in/

tombé

timbè

timbeu, teubeu

teubè, C

Dénasalisation dans la syllabe initiale inaccentuée

campagne
enfant
sentir
manger



tantôt
(à --) (au revoir)

Bout menteur (32)
bonbon
content
longtemps
pompons
fontaine (source)


éfant
sati
moger



taantôt (33) (à--)

Bout menteux (34)
bobon
cotent
logtemps
popons
fotaine

compagne
éfunt (éfants (35))

manger



tontôt (à --)

Bout mateux




foutaine

copagne, StV


meuger, GD
mager, F
mouger, StV

tatôt (à --), GD, StV






/o/ vs /aô/

autre
autrefois
faux (n. f.)
chaud
caudrette

aaute
aôtfè
faôx
caôd
caôdrette

autfè



caudrette

autfè, StV



caudrette, StV

/o/ vs /iaô/

eau
peau
seau

iâeau
piâeau
siâeau (36)

 

de l'iâeau, StV

/ê/ vs /êï/

bête
fête
tête

bêïte
fêïte
têïte

 
 

Diphtongaison de /an/

cantique
chandelle
chanson

caantique
caandelle
caanchon

contique
candelle
conchon

 

Variétés de prononciation de quelques items

Français commun ou item dialectal

Senneville

Yport

Localités de  l'annexe 1

avec

avé, aveux,
aveuque

 
 

bien, point

 

biè

bié, pin, C
bi, StV

chantepleure

champlure

chompleuse

campleuse, D

cimetière

chimtié

chemtié

chemtié C

débrouillard

dégouguiné

dégougineu

dégouginè, H

maquereaux

maquarias et maquayas (37)

maquediâs et maquadiâs

maquerias, D

perrey (plage de galets)

perrey

perreu

perré, F
perra, StV

pleuvoir

plouvi


pleuvi

pleuver et
plouver, GD
pleuvi, StV

puits

puits

pits

puits

tabatière

connasse et cnnasse

cnnasse

connasse C, D

tombereau

bénet

bénet

banet, H
bénet,
pl. begnias, StV


Nous allons maintenant résumer l'ensemble des traits vocaliques recueillis à Yport, apparaissant dans les tableaux ci-dessus, qui s'écartent de ceux des autres localités cauchoises où nous avons fait des enquêtes.

Finales en -eu

a) Prononciation du français commun " moi " et " toi "
Les formes yportaises pour " moi " et " toi ", respectivement meu et teu, parfois ma et ta, se distinguent de celles que nous avons recueillies dans d'autres localités cauchoises. Nous en avons observé un grand nombre d'occurrences, comme par exemple :
y avait man pé / y avait meu / y avait le Porc (38)
les parents disaient / dépêche-teu d'aller à l'école


L'un de nos témoins rapporte une anecdote :
elle disait [citation] teu / forchément (forcément) teu / tu peux te payer des bieaux mecs / teu // mais meu / j'ai qu'à me payer un carabot (39) (docker) / les bieaux mecs / ils galopent (courent) pas après meu [fin de citation]

Cependant, ce même témoin réalisera spontanément de nombreuses fois [ma] et [ta] pour " moi " et " toi " mais le niera énergiquement quand nous l'interrogerons à ce sujet.

b) Prononciation de finales de français commun et -er
Certaines finales du français commun (participe passé) et -er (substantif) sont généralement réalisées -è dans le pays de Caux. A Yport, elles le sont en -eu. Un témoin né en 1945 nous explique :
à Yport / on dit le roquer ou le rquer / ça dépend

Mais un témoin né en 1919 intervient aussitôt :
le roqueu qu'on disait / on va aller dans le roqueu

Si nous pensons que la prononciation du témoin le plus âgé est celle qui a prévalu autrefois à Yport, c'est que nous avons recueilli un grand nombre de finales en -eu émises spontanément, comme par exemple :
j'ai monteu su (sur) le queu (quai)
y avait un yacht à côteu

Cependant, le témoin ayant réalisé les deux séquences ci-dessus, examinant avec nous des images de poissons, dira :
<c'> est un maquereau et à côtè / vous avez une dorade

Lors de nos enquêtes, nous avons constaté que la réalisation du terme " maman " était généralement mam'man ou moman ou comme en français dit populaire. A Yport, dans les classes sociales les plus élevées, la réalisation du terme était momeu tandis que les classes moins favorisées employaient oumun (40).

c) Français commun -a et -al vs -eu à Yport
La finale de certains items de français commun en -a et -al est réalisée -eu à Yport ainsi que d'autres termes (maman, soif, etc.).

Exemples de finales yportaises en -eu :

ça
carnavali.carnaval (carnaveu)
celle-là, celui-là
cheval
Grainval

maman
moi, toi
papa
plat, adj.
quoi
soif
tabac
va (il s'en --)
val, Fond du val

cheu
carnaveu
cté-leu, cti-leu
gveu
Grunveu
leu
momeu
meu, teu
papeu
pleu
queu
seu
tabeu
veu
veu, Fond du veu

Français commun an vs on à Yport

Ainsi que nous l'avons observé plus haut, le son an du français commun de certains items est réalisé on à Yport, par exemple, dans les termes suivants :

campagne
cantique
chanson
commander
enjambée
grand
lancer
sans
tambour
tantôt

compagne
contique
conchon
cmmonder
engombeille
grond
loncher
sons
tombour
tontôt

Le même phénomène se retrouve dans la réalistion de termes dialectaux, par exemple :

brandi (entier)
champlure (chantepleure)
gambon (tige sèche)
langet (lange)
vergandier (fragon épineux)
randouiller (mijoter)

brondi
chompleuse
gombon
longet
vergondier
rondouiller

Français commun an vs un
prononcées un à Yport, par exemple :

argent
enfant
Fécamp (41)
manant
merlan
moment
vent

ergeunt
éfunt
Fécunp
manunt
mélun
momunt
vunt

Français commun -u vs -in

Nous avons recueilli seul cas où la finale du français commun -u est réalisée -in dans les mots composés " nu-pied " et " nu-cou " qui sont prononcés à Yport, ainsi que dans toutes les localités de l'annexe 1, nin-piè, nin-cô. On peut trouver la variante neu-piè, neu-cô.

Les diphtongues

Des diphtongues, recueillies dans des conversations libres à Senneville et dans les autres localités où nous avons enquêté, n'ont pas été faites à Yport. Et lorsque nous avons posé des questions précises sur leur emploi, nous avons obtenu des réponses telles que la suivante :
j'ai entendu qu'ils disent biâeau à Fécamp / mais chez nous c'est bieau

Finales en -a

Certaines finales du français commun ainsi que de termes dialectaux en -é ont-elles été autrefois réalisées -a à Yport ? Voulant montrer la prononciation des habitants d'Yport aux alentours de 1900, Barré (1952:35) écrit de la façon suivante (l'orthographe de l'auteur est scrupuleusement respectée) un infinitif et des participes passés là où le français commun, dans sa forme écrite, aurait respectivement la finale -er et -é : " ... tu vas tumbas ... est tite soeu qui m'a poussat pi j'ai tomba ... le pesson déquarqua, tria et partagea ... ". Delaunay (1994:47) note aussi un participe en -a : " En patois d'Yport on dirait : 'ça leû za portâ malû' [ça leur a porté malheur] " et il nous assure aussi :
avant j'entendais ma mère qui disait ma et ta / puis / c'est devenu meu et teu / même c'était dans une histoire qu'on racontait / le mari et la femme avaient été invités au restaurant par l'amant / mais c'est la femme qu'avait payé // à la fin / le mari dit / j'ai bien bu bien mangea rien m'a coûta / alors sa femme elle répond / tais-ta / paure aveugla (pauvre aveugle) <c'> est ta qu'a paya

Un témoin fécampois né en 1902 et qui, enfant, avait eu l'occasion d'entendre le parler yportais, nous confia spontanément :
à Yport / ils disent ma et ta / mais sur le plateau / c'est et

Un Yportais, qui d'ailleurs s'en étonne, constate :
avant / on disait toujours la cla / et puis maintenant / c'est la cleu

Et notre témoin cite une question entendue dans sa jeunesse. La femme s'adresse à son mari qu'elle appelle par son nom de famille :
as-tu ta cla (clé) / Déva (Dévé)

Au terme de plusieurs heures d'entretiens, nous tirons des conclusions avec deux témoins et demandons :
[notre question] nous sommes donc bien d'accord / à Yport / pour " moi " et " toi " / on dit meu et teu [réponse d'un témoin] oui / c'est ma puis ta

Nous avions bien remarqué, dans les entretiens libres avec ces témoins, des occurrences de ma et ta mais, interrogés différentes fois, ils nous assureront toujours qu'ils n'emploient que meu et teu.

Comment expliquer le passage de a à eu ? Ainsi que nous avons pu le constater (voir supra), le terme " maman " était réalisé à Yport selon la classe sociale, la variante momeu étant celle des classes supérieures. Il a pu exister également des variétés de prononciation concernant la réalisation de certaines finales jugée plus raffinée et adoptée peu à peu. On pourrait penser que c'est pour une raison semblable, ou par souci (inconscient) de s'exprimer comme les non Yportais que, comme nous l'avons vu au § 2.1.3, les finales en -eu sont en train de disparaître au profit de celles en -è, communes dans l'ensemble du pays de Caux.

En ce qui concerne la prononciation à Yport, les différences par rapport au français commun et, dans certains cas par rapport aux réalisation des parlers des villages avoisinants sont :

1) la réalisation d'une finale en -eu (dont certaines étaient en -a il y a encore une soixantaine d'années) opposées au français commun -oi, -oif, -a, -al, -é et aux parlers locaux -è
2) la réalisation d'un on opposé au français commun et termes dialectaux en an
3) la réalisation un opposée au français commun et termes dialectaux en an.
On notera aussi que le parler yportais, comparé à la langue des localités des environs, comporte très peu de diphtongues.


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